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Supports d’entretien client, aide à la décision, lutte contre les fraudes, amélioration de la productivité… L’intelligence artificielle ouvre de nouvelles portes aux banques et aux assureurs français. Encore à stade quasi embryonnaire, elle pourrait néanmoins servir à industrialiser la personnalisation client. À moins que ces opportunités ne constituent un danger pour l’humain… 

Hier matin, jeudi 30 mars, s’est déroulé au Westin Paris Vendôme l'événement Digital Leaders Banque & Assurances by lesBigBoss. Dans cet écrin cotonneux du 3è arrondissement de la capitale, plusieurs faits ont marqué cette matinée business. D’une part, elle a réuni plus de 50 décideurs et acteurs du secteur qui ont échangé sur les bonnes pratiques du moment. D’autre part, plus 500 rendez-vous one to one affinitaires ont été organisés via un outil de matchmaking business maison qui ont permis aux décideurs porteurs de projets de rencontrer leurs futurs partenaires stratégiques.

Mais il y a un moment qui a davantage marqué cette matinée. Deux moments, plutôt : la keynote d’Alain Clot, président de France Fintech, suivie de la conférence plénière réunissant Romain Robin, directeur marketing digital du groupe Allianz Trade, Thomas Courtois, président de Nickel, Héloise Beldico, CMO de Ma French Bank… et Alain Clot, tellement à l’aise dans l’exercice de la keynote qu’il en a profité pour prolonger sa participation à la conférence. Autant de grands noms du secteur qui se sont réunis autour de la thématique suivante : « Gestion des risques, personnalisation client, détection des fraudes, analyses RSE… L’intelligence artificielle révolutionne-t-elle le secteur Banque & Assurances ? ». Alors pourquoi ce sujet de l’intelligence artificielle (IA) ? Déjà, parce qu’il agite toutes les lèvres depuis ce début d’année. Puis parce que l’IA se déploie particulièrement dans le secteur bancaire et financier, qui constitue un terrain favorable à son développement. À tel point qu’un bon nombre d’utilisations de cette techno, souvent innovantes, pourraient inspirer d’autres secteurs.

Banque & assurances : un secteur en pointe sur l’IA

L’avance prise par le secteur banque & assurances sur le terrain de l’IA est récente. Elle remonte au confinement. Agents conversationnels pour les appels entrants, robots intelligents pour les demandes de report de crédit, renforcement de la cybersécurité… Si ces solutions étaient déjà utilisées auparavant, la crise a joué un rôle d'accélérateur. Rien d’étonnant, en somme : les apports de l'IA sont nombreux, de la personnalisation des offres à l'enrichissement de la relation et de la connaissance client en passant par l'automatisation de la gestion des sinistres. « L’IA a un rôle majeur à jouer dans tous les domaines, que ce soit en géopolitique ou dans le secteur de l’assurance, soutient Romain Robin. Dans le domaine qui me concerne, elle peut par exemple élaborer des prévisions en matière de risques et permettre d’assurer les clients en fonction de celles-ci. Dans le même style d’idées, c’est un peu ce que fait Tesla aux Etats-Unis. »

Ce que dit le directeur du marketing digital d’Allianz Trade est juste. Pour établir le prix de l'assurance, le constructeur Tesla se base sur l'Autopilot de ses voitures, avec une note de 1 à 100, et analyse le style de conduite, les dangers ou encore la capacité à limiter les freinages intempestifs. Plus on adopte une conduite prudente, plus les avantages proposés sont nombreux. 

Chez Nickel, on partage aussi ce souci d'engager la responsabilisation de chacun grâce à l’IA. « Cette technologie nous permet de prendre des mesures pour protéger la structure, explique Thomas Courtois, CEO de Nickel, rappelant que sa banque, qui permet d’ouvrir un compte chez son buraliste sans conditions de revenus, n’autorise pas de découvert. Grâce à la performance de nos outils, nous pouvons procéder à une catégorisation automatique des dépenses qui permet de responsabiliser nos clients. » Plus globalement, pour le patron de Nickel, l’apport de l’IA se regroupe autour de trois champs d’action : 

-       La lutte contre la fraude

-       L’amélioration du service client en qualifiant la demande et orienter les clients vers des solutions personnalisées

-       L’écoute des clients quand ils s’expriment sur les plateformes digitales au sujet de la marque, ce qui permet aux équipes de Nickel de mieux étudier les points de friction.

« Le potentiel de l’IA dans les services financiers est considérable et nous n’en sommes qu’au tout début. »

Alain Clot, président de France FinTech

L’IA, un danger pour l’humanité ?

Pour autant, en dépit d'avancées et d’opportunités indéniables, l’IA ne représente-t-elle pas également un danger, notamment en effaçant l’humain progressivement ? Selon Alain Clot, il y a une tendance forte dans le business, celle de l’industrialisation de la personnalisation. Et de ce point de vue, l’IA permet d’adapter une solution aux besoins des clients. Pour lui, l’IA reste une révolution technologique, elle est universelle et regroupe tous les secteurs : « Le potentiel de l’IA dans les services financiers est considérable et nous n’en sommes qu’au tout début ».

Enfin, concernant le rôle de l’humain, le président de France FinTech se montre optimiste. « Le client n’est pas monolithique, il sait faire la différence entre une approche uniquement transactionnelle et une approche humaine. Et pour prolonger cette idée, en termes d’emplois qualifiés, je n’ai pas une vision catastrophiste de l’IA. Les mêmes débats ont eu lieu avec la machine à vapeur ou encore l’électricité. En réalité, c’est la transition qui est compliquée, pas la finalité ». Certes. Toujours est-il que la réglementation bancaire repose sur le postulat d’une supervision humaine, éventuellement aidée par la machine. Et l’IA inverse ce postulat. Peut-être pas encore au point de mettre les banquiers sur le banc de touche. Mais au moins d’autres professions, qui nécessitent moins de rapports humains, comme les professions affiliées au droit, par exemple. « Une grande banque américaine a déjà remplacé ses juristes par des outils IA », confirme Alain Clot, sans donner davantage de précisions. 

Aujourd’hui, même Elon Musk, l’homme le plus riche du monde, s’inquiète des ravages que pourrait causer l’IA. Dans une lettre ouverte parue le 28 mars, le PDG de Tesla et un autre millier d’experts du secteur veulent « mettre en pause » l’avancée de l’intelligence artificielle. Plus précisément, ils souhaitent suspendre pendant six mois les recherches sur les systèmes plus puissants que GPT-4, le nouveau modèle de traitement du langage lancé mi-mars par OpenAI, l’entreprise à l’origine du robot conversationnel ChatGPT. 

Cette inquiétude des experts en IA pourrait gagner les plus grandes économies du monde, puisque selon Goldman Sachs, un quart du travail actuel pourrait être automatisé avec de l'intelligence artificielle. La banque américaine estime aussi que ChatGPT et ses émules pourraient contribuer, à terme, à faire progresser de 7 % le PIB annuel. Il y a donc peut-être un juste équilibre à trouver entre richesse et capital humain...

Lire aussi : Comment utiliser l'IA pour personnaliser l'expérience client dans le tourisme ?

 

Damien Grosset

Publié par Damien Grosset